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Création et reprise d'entreprise

Création d’entreprise : Les priorités de l’État pour encourager l’innovation et soutenir les entrepreneurs

Par Warner Altarac | Publié le 18/09/2025

Interview de Véronique Louwagie, Ministre déléguée chargée du Commerce, de l’Artisanat, des PME et de l’Économie sociale et solidaire, concernant la création d’entreprise.

Nous sommes dans un contexte économique en mutation. Quelles sont selon vous les priorités actuelles pour encourager la création d’entreprise en France, notamment dans les territoires ?

Encourager la création d’entreprise dans un contexte économique en mutation

L’État a engagé plusieurs réformes pour favoriser la création d’entreprise. Ainsi, la simplification administrative constitue un levier clé. Notamment avec la mise en place du guichet unique électronique pour les formalités d’entreprises. Ce guichet, devenu vraiment unique en janvier dernier, est suivi par mes équipes et moi-même chaque semaine. Cela a pour but de garantir l’amélioration continue et résoudre les difficultés remontées du terrain. Cet outil numérique doit contribuer à rendre l’acte d’entreprendre plus accessible, en simplifiant notamment les formalités de créations d’entreprise ou de modification. Ce sont ainsi une cinquantaine de formulaires Cerfa qui ont été supprimés. Le gouvernement a également renforcé la lisibilité des dispositifs d’aide via des plateformes comme Entreprendre.service-public.fr et Bpifrance Création. Ces plateformes orientent les porteurs de projet vers les 27 réseaux nationaux d’accompagnement à la création-reprise du Collectif Cap Créa dont BGE, France Active, Initiative France, et le Réseau Entreprendre.

Des outils concrets pour soutenir les entreprises innovantes

Un autre exemple de nos travaux vers plus de simplification et lisibilité des dispositifs est le simulateur d’aides fiscales à l’innovation. Lancé récemment, il a connu un nombre record d’utilisations dès la première semaine de lancement. Le simulateur est destiné aux entreprises qui cherchent à simuler leurs droits sur six dispositifs :

  • le crédit d’impôt recherche (CIR),
  • le crédit d’impôt en faveur de la recherche collaborative (CICo),
  • le crédit d’impôt innovation (CII),
  • la jeune entreprise innovante (JEI),
  • la jeune entreprise universitaire (JEU),
  • et la jeune entreprise de croissance (JEC).

Cet outil aidera les entreprises à estimer rapidement leur éligibilité aux aides de l’État pour leurs projets innovants. Ainsi, cela leur permet d’appréhender plus simplement ces dispositifs, et de planifier leurs décisions en fonction de ces avantages potentiels. Nous espérons ainsi réduire le taux de non-recours des TPE-PME aux aides à l’innovation… Et soutenir la compétitivité de ces entreprises.

Accompagner les primo-entrepreneurs et soutenir les territoires

L’accompagnement des primo-entrepreneurs est une priorité. L’État soutient les réseaux consulaires des CCI et CMA. Il finance des programmes pour des publics spécifiques comme les jeunes, les femmes et les habitants des quartiers prioritaires. Des outils publics d’aide au financement comme les microcrédits (via l’ADIE), les prêts d’honneur ou encore les aides à l’innovation de Bpifrance permettent de sécuriser l’amorçage, puis les premiers investissements.

Enfin, l’État adapte ses politiques aux spécificités locales : fonds de soutien au commerce rural, soutien aux tiers-lieux, valorisation des métiers artisanaux, aides spécifiques pour l’outre-mer. Ce soutien public intégré est crucial pour faire de la création d’entreprise un moteur de développement territorial.

Vous avez lancé le 7 juillet la « Mission REPRISE », qui vise à dynamiser la transmission d’entreprise. Quels sont les constats à l’origine de cette mission, et quelles mesures concrètes pourraient émerger à court et moyen terme ?

La transmission d’entreprises est essentielle pour préserver et développer le tissu entrepreneurial. En effet, alors que les entreprises cédées ou transmises présentent des perspectives économiques plus favorables que celles créées, le manque de repreneurs et les difficultés inhérentes au marché des transmissions freinent la reprise de nombreuses entreprises. Cette situation est un frein à la croissance et une source de fragilité sociale. En effet, elle peut se traduire par la disparition chaque année de milliers d’entreprises pour lesquelles une reprise aurait été possible et profitable. Ainsi, avec 500 000 entreprises qui devraient être cédées dans les dix prochaines années au vu de l’âge des dirigeants d’entreprise, la France est confrontée à un triple enjeu pour la vitalité de nos territoires, pour notre souveraineté et pour la transmission de nos savoir-faire. 

Objectifs de la mission

Face à ces constats, j’ai tout d’abord souhaité qu’une publication annuelle des données sur la transmission dont les premiers résultats ont été publiés en juin, soit assurée par la Direction générale des Entreprises (DGE) et permette de partager un état des lieux de la situation et de prioriser nos actions sur cette thématique afin d’aider au mieux les cédants et les repreneurs. J’ai également lancé une mission dédiée à la transmission-reprise. Elle a un objectif : favoriser massivement la reprise d’entreprises partout en France, en levant les freins, en coordonnant. Mais aussi en outillant mieux les acteurs de la transmission-reprise. 

Les quatre axes prioritaires

Piloté par la Direction générale des Entreprises (DGE), ce réseau nommé « Mission Reprise » rassemble les principaux acteurs nationaux de la transmission-reprise afin qu’ils travaillent ensemble à l’élaboration d’un plan d’actions visant à proposer des solutions concrètes aux quatre principaux enjeux que nous avons identifiés, à savoir :

  • mieux sensibiliser, informer et former tant les cédants que des repreneurs,
  • fluidifier l’appariement entre l’offre et la demande de reprise d’entreprise,
  • lever certains freins fiscaux, réglementaires, financiers,
  • et enfin, cordonner l’animation territoriale .

Chaque groupe de travail se réunira en septembre pour être en mesure de restituer ses travaux fin 2025 et ainsi poser les fondations de ce qui constituera la feuille de route « Mission Reprise » du Gouvernement. 

Quels dispositifs d’accompagnement vous semblent aujourd’hui les plus pertinents pour les dirigeants, qu’il s’agisse de formations, de financement ou de soutien à l’innovation ?

Le Premier ministre a récemment rappelé l’importance de soutenir l’économie française, la croissance et l’innovation. C’est tout l’objectif du plan France 2030, qui vise à soutenir les secteurs d’avenir, avec une attention particulière pour les « acteurs émergents » puisque 55% des bénéficiaires de France 2030 sont effectivement des TPE, PME et ETI. Des appels à projets s’adressent directement aux dirigeants de PME, je pense notamment au dispositif « Cyber PME » dont l’objectif est l’outillage des PME face au risque accru de cybermalveillance.

Rôle des acteurs clés

En France, de nombreux acteurs sont mobilisés pour accompagner les dirigeants de PME dans leur dynamique de croissance et d’innovation, en leur apportant expertise, soutien financier, réseau et montée en compétences.

Ainsi, j’encourage les dirigeants à faire appel à l’INPI, qui joue un rôle clé dans la protection et la valorisation des actifs immatériels des PME, grâce notamment au Pass PI, un dispositif finançant des prestations de conseil pour protéger les actifs immatériels (brevets, etc.). Son maillage territorial, avec près de 70 chargés d’affaires en région et 10 conseillers à l’international, garantit une proximité efficace avec les dirigeants à chaque étape de leur démarche.

Programmes Bpifrance et accélérateurs

En complément de leurs programmes de financements (prêts bonifiés, subventions, etc.), les dirigeants de PME apprécient grandement les missions de conseil de Bpifrance. En particulier, les programmes d’accélérateurs qui proposent un accompagnement individuel (diagnostics, conseil stratégique) et des temps collectifs (formations, retours d’expérience) et permettent ainsi de former les dirigeants aux enjeux majeurs tels que la transition écologique et numérique ou l’internationalisation. Au-delà de la montée en compétences, ils facilitent la mise en réseau entre pairs et l’accès aux dispositifs de financement portés par l’État et ses partenaires.

Mission French Tech

Enfin, la Mission French Tech propose un accompagnement entreprises de la Tech, avec des programmes comme French Tech Next40/120 ou French Tech 2030. Elle mobilise l’ensemble des leviers de l’État via des correspondants dans chaque administration, garantissant un soutien optimal. Grâce au programme Je choisis la French Tech, les startups et scale-ups bénéficient de l’engagement de plus de 600 entreprises et 90 acteurs institutionnels, mobilisant un milliard d’euros dans l’achat de technologies françaises entre 2024 et 2026.

Programme ETIncelles

De la même manière, pour fluidifier au maximum les relations des PME avec l’ensemble des services de l’État, nous avons mis en place le programme ETIncelles, un dispositif d’accompagnement des PME en forte croissance visant à lever les blocages administratifs. Ce programme est donc un outil utile pour les dirigeants de PME ancrées dans les territoires qui aspirent à croître et innover.

Comment l’État travaille-t-il actuellement avec les collectivités territoriales et les chambres consulaires pour favoriser l’identification, la mise en relation et la réussite des transmissions d’entreprises ?

C’est là tout l’enjeu de la Mission Reprise : fédérer tous les acteurs compétents, publics et privés, rassembler les énergies, partout dans les territoires, pour soutenir et renforcer la dynamique de la reprise d’entreprise.

Dès le lancement de la Mission, j’ai souhaité y associer les consulaires et les collectivités territoriales, régions et intercommunalités. Ce sont ces acteurs qui assurent le « dernier km » de ces politiques publiques, qui ont une connaissance fine des entreprises de leurs territoires : ils connaissent leurs dirigeants, leurs histoires, et les enjeux autour de leur transmission.

Deux groupes de travail se pencheront plus particulièrement sur ces enjeux d’accompagnement et d’appariement : d’une part, le groupe de travail « Appariement entre l’offre et la demande » vise à fluidifier la rencontre entre cédants et repreneurs, en s’appuyant sur les initiatives existantes, afin de maximiser le nombre de reprises et d’autre part le groupe « Animation territoriale et coordination » aura tout particulièrement pour objectif de garantir à terme un socle de services efficace sur l’ensemble du territoire, en s’inspirant des meilleures initiatives locales. 

Enfin, un mot peut-être pour rappeler pourquoi la transmission d’entreprise est aujourd’hui un enjeu national, autant sur le plan économique que social ?

Nous visons ici un message fort, presque institutionnel, à l’attention de nos lecteurs.

« Ensemble, nous pouvons avancer concrètement sur ce chantier essentiel des transmissions reprises. Ce sont des milliers d’entreprises, partout en France, qui font vivre nos territoires, perpétuent les savoir-faire et créent de l’emploi. Avec cette mission, l’État peut s’appuyer sur un réseau d’acteurs dont l’expérience et la connaissance fine du terrain sont précieuses et permettront de mettre en place collectivement des mesures efficaces. »